Le Jeu de 34 cartes

La peinture est une transfiguration de l’âme, le jeu une transfiguration de la peinture, le ludique une sublimation du jeu.

PRESENTATION ET DESCRIPTION DE LA SERIE

Le jeu se compose de 34 cartes de deux formats différents. Les 12 cartes figures, 110×170, huile sur toile, datent de 2011 ; les 22 cartes chiffres, 55×85, sont de 2014.
Le jeu comporte un as de cœur supplémentaire, c’est donc un jeu de tricheur, en référence aux tableaux célèbres de Georges de La Tour, Le Tricheur à l’as de trèfle et Le Tricheur à l’as de carreau.
Les cartes sont la reproduction à l’identique d’un jeu de 32 cartes français classique de type portait de Paris, avec le nom des personnages. Sur les cartes figures, seules les parties charnues (tête et mains) sont modifiées. L’orientation des têtes reste la même. Sur les cartes chiffres, la couleur des enseignes est inversée.

LA PEINTURE ET LE JEU

Plastiquement, j’ai traité les figures de manière anatomique, afin de révéler une intériorité à la fois hideuse et pourtant humaine.
En 2011, je cherchais un thème qui me permette d’appliquer les cinq couleurs, les trois primaires et les deux non couleurs, qui constituaient alors ma palette, sans que la peinture ne se mélange ; ce qui est le cas des cartes à jouer.
Concernant la matière, une opposition forte se fait entre les parties charnues, travaillées au couteau, qui contiennent beaucoup de matière picturale mélangée et le reste de la carte avec une couche picturale fine appliquée au pinceau et à la brosse.
La structure est celle de l’agrandissement (x20 pour les figures et x10 pour les cartes chiffres), fait à l’œil et à main levée à partir des cartes et non au carreau, ce qui m’a permis de traiter la symétrie de manière vraiment humaine, c’est-à-dire imparfaite ! La peinture est une illusion.
La diagonale sur les cartes figures m’intéressait particulièrement de ce point de vue-là, mais aussi parce qu’elle permet la construction en miroir, et donc le possible retournement de la peinture. Je souhaite que l’on puisse s’emparer de mon travail en l’installant de différentes manières selon son goût.
Pour l’accrochage, j’accentue la dynamique de la diagonale, en installant les cartes au mur de guingois, comme si elles étaient jetées sur une table. Par ce mouvement immobile, Je conteste la disposition classique de la peinture au mur alignée et rectiligne.
En 2014, j’ai complété le jeu avec 22 cartes chiffres dont j’ai inversé les couleurs. C’est l’illusion d’optique qui m’intéressait et effectivement le cerveau ne voit pas ce que voient les yeux. Passionnant pour un peintre !

LE FOND ET LA PHILOSOPHIE

Avec un visage blanc et un visage noir, c’est la dualité de l’homme que j’explore avec les cartes figures. Les deux visages de l’homme donc, mais également ce que la machine humaine a de plus caché. Une mise à nu en quelque sorte et une autocritique. Par l’opposition entre intérieur et extérieur, je choisi de lever le voile des apparences et de montrer que nous sommes tous identiques sous notre masque. C’est cette intériorité qui nous fait humain, roi ou simple mortel.
Le jeu de cartes porte en lui-même la dualité entre le populaire et l’aristocratique. Populaire car toutes les classes sociales jouent aux cartes, aristocratique par les personnages représentés. Le jeu raconte également l’histoire occidentale, héritage du paganisme et de la civilisation judéo-chrétienne.

LE LUDIQUE : LE PEINTRE, LA PEINTURE ET LE REGARDEUR

Avec les cartes figures, j’ai exploré un thème universel afin d’établir un dialogue avec le public.
Après la réalisation des 22 cartes chiffres, mon intention est d’éditer le jeu dans le but de « démocratiser la peinture ». Je propose également la location du jeu complet ou en partie.
J’ai réalisé d’autres séries sur le thème du jeu : morpions 2012, dés dépliés, our mind, 2013.
Ces jeux m’ont amené à concevoir des assemblages et par la même à repenser l’idée de structure. Ils m’ont également permis de réintégrer le vert dans ma palette et de mettre au point le code couleur BNJRBV.
Après la réalisation de quatre jeux, un glissement progressif s’est fait vers l’idée plus large du ludique, qui conserve certains aspects du jeu et en même temps se libère de toute règle.
Les ingrédients du ludique dans ma peinture agissent de concert à différents niveaux et dans une forme la plus simple possible ; le tout étant régit par un double mouvement d’attraction/répulsion.

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